agerzam said:
Selon vous, faudrait-il appliquer des règles d'écriture purement théoriques ou faudrait-il respecter un minimum de pratique orale ?
Par exemple :
Pour placer le 'e', l'INALCO dit de partir de la droite et de le mettre après la première consonne et ensuite après 2 consonnes.
Donc KRZ : labourer --> krez
Alors que intuitivement moi je l'écrirais : kerz
Comment vous voyez ça ?
Le schwa est quelque chose que Tamazight ne fait que tolérer, dans certains parlers il n’est réalisé que rarement, c’est le cas de Tachelhit.
A l’écrit, le schwa ne doit remplir qu’une fonction lubrifiante ( pour faciliter la lecture de mots ne comportant pas de voyelles ), ce qui explique le caractère purement conventionnel de la règle instituée par l’INALCO pour standardiser la graphie latine de Tamazight.
A l’oral, et pour le même mot, le schwa peut se réaliser dans certains parlers et être absent dans d’autres, même sa position dans le mot variera en fonction des parlers.
Donc, l’intuition que tu invoques, Agerzam, pour justifier la position du schwa dans KRZ tel que tu le prononces, n’est que l’intuition d’un locuteur pratiquant un parler déterminé, celui des Achtuken en l’occurrence.
Un article intéressant à lire à ce sujet :
http://sd606.sivit.org/asays/rubrique.php3?id_rubrique=19
En voici un petit extrait :
« …… Un certain nombre de remarques sont à faire à propos des ces données. Le schwa, même chez les deux locuteurs qui le réalisent, ne paraît pratiquement qu’en position finale du mot. Il n’apparaît jamais en milieu de séquence chez H et ne concerne que quatre formes chez E ( H et E sont des locuteurs originaires de la ville d’Agadir ).
La présence du schwa dans la position finale de certains mots est un aspect attesté dans d’autres langues. C’est le cas notamment de certain mots français comme cap, bec, etc. Le schwa dans cette position sert principalement à identifier la consonne finale, particulièrement faible dans cette position, en la plaçant dans une position pré-vocalique où des indices sur sa place d’articulation (le burst, la transition des formants) seront présents. Ce phénomène s’accentue plus particulièrement dans les formes prononcées d’une manière isolée comme c’est le cas pour nos données.
La présence du schwa au milieu de certaines séquences est due à l’influence de l’arabe marocain. C’est une réalité connue qu’une partie des locuteurs chleuhs, élevés à Agadir ou dans toute autre ville où l’arabe marocain est présent, imite la prononciation de cette langue, considérée comme plus prestigieuse. Le sujet E, qui a vécu à Agadir, peut insérer un schwa au milieu d’une séquence d’obstruantes sourdes, mais cela n’est pas acceptable pour le sujet K, par exemple, qui a vécu plus de trente ans dans un village berbère éloigné avant de s’installer à Paris. Cette tendance est d’autant plus renforcée que ce sont souvent ef,les mots récemment empruntés à l’arabe, comme c’est le cas pour s tfte ђ , fqqes, qui sont réalisés de la même manière qu’en arabe marocain.
La distribution du schwa peut parfois être particulièrement instable même au sein d’une même forme. E peut réaliser une forme avec ou sans schwa, comme c’est le cas pour kks et tfktstt. Il peut réaliser une même forme avec des schwas dans des positions différentes. C’est le cas notamment de sfqqst et tft ђ . Comme le montrent les deux spectrogrammes ci-dessous pour sfqqst, un schwa est prononcé entre /f/ et /q/ pour la première réalisation et en fin de mot pour la seconde….. «