La mort de la langue Tamazight ?
Azul fell-awen
Je propose ici, au fur et à mesure, un texte tiré du livre de Claude Hagège , Halte à la mort des langues Odile Jacob.
Claude Hagège est chercheur en linguistique, professeur au Collège de France et médaille d’or du CNRS en 1995.
Cet auteur explique rationnellement le processus de la mort des langues. Je retrouve dans ce qu’il dit beaucoup d’étapes de ce processus d’extinction que je connaissait déjà, en milieu kabyle.
Ce livre doit être lu par chaque un d’autres nous, pour comprendre le sort qui attend notre langue si on se dépêche pas de lui garantir les conditions de sa survie
Un lien
http://www.tlfq.ulaval.ca/AXL/Langues/2vital_mortdeslangues.htm
L'EXTINCTION [ DES LANGUES ]
La notion d'extinction, plus métaphorique que celle de disparition, évoque adéquatement, pour l'imagination, ce que peut signifier le phénomène. Il s'agit d'un retrait total de la scène, concomitant, par définition, de celui des dern niers locuteurs, qui s'éteignent sans descendance. L'extinction d'une langue est donc celle des derniers vieillards qui la balbutiaient encore, ou parfois celle de toute la communauté qui la parlait, quels que soient les âges. L'extinction s'achève en substitution lorsque, ainsi qu'il arrive très fréquemment, les générations suivantes abandonnent complètement la langue dont il s'agit, et en adoptent une autre.
On peut donc dire qu'une langue est éteinte quand elle n'a plus de locuteurs de naissance, c'est-à-dire d'utilisateurs qui l'apprennent depuis le début de leur vie dans le milieu familial et social, et auxquels cet apprentissage confère ce qu'on peut appeler une compétence native ; cette dernière est elle-même définie comme une connaissance complète et une capacité d'usage spontané, qui font de la langue considérée un instrument de communication propre à toutes les circonstances de la vie quotidienne. Dans une telle perspective, une langue vivante sera définie comme celle d'une communauté qui renouvelle d'elle-même ses locuteurs de naissance ; et une langue morte, si l'on choisit de conserver ce terme, sera celle d'une communauté où la compétence native a totalement disparu, dans la mesure où les locuteurs de naissance n'ont transmis qu'imparfaitement leur savoir, leurs descendants transmettant à leur
tour une aptitude de plus en plus faible à parler et à comprendre l'idiome du groupe.
Deux conséquences peuvent être tirées de ces définitions. En premier lieu, l'implication individuelle de la notion de mort est ici absente. La mort d'une langue n'est certes pâs celle d'une communauté physique, puisqu'une société humaine qui abandonne une langue pour une autre ne meurt pas elle-même pour autant. Mais la mort d'une langue est un phénomène collectif. C'est le corps social tout entier qui cesse de parler cette langue. Même s'il est vrai que la mort des derniers locuteurs de naissance est un phénomène individuel, on doit considérer que l'extinction d'une langue qui disparaît avec eux est celle d'une communauté linguistique.
En second lieu, les derniers locuteurs de naissance à partir desquels s'amorce le processus d'extinction peuvent se trouver dans deux situations différentes : ils sont soit dans l'espace d'origine, où la langue est parlée comme patrimoine autochtone, soit dans un lieu d'immigration, où une communauté déplacée la conserve encore au sein d'un environnement qui parle une autre ou plusieurs autres langues. Une langue peut donc s'éteindre in situ, mais elle peut aussi s'éteindre en diaspora ; ce dernier cas est illustré par les exemples de communautés d'origine norvégienne ou hongroise vivant aux États-Unis depuis un siècle ou davantage, et chez lesquelles le norvégien ou le hongrois est, selon les individus, soit éteint, soit menacé
d'extinction.
L'EXTINCTION PAR ÉTAPES
Dans ce qui suit, je tenterai de caractériser les étapes d'un processus dont l'aboutissement dernier est la mort d'une langue. Je parlerai de précarisation à propos des étapes initiales, et d'obsolescence à propos des étapes antérieures à l'issue ultime. Pour référer d'une manière plus générale à l'ensemble du processus, j'emploierai d'autres notions, comme celle de délabrement, ou, prises méta riquement à partir de la géologie et du droit, celles d'érosion et de déshérence.
A SUIVRE
Azul fell-awen
Je propose ici, au fur et à mesure, un texte tiré du livre de Claude Hagège , Halte à la mort des langues Odile Jacob.
Claude Hagège est chercheur en linguistique, professeur au Collège de France et médaille d’or du CNRS en 1995.
Cet auteur explique rationnellement le processus de la mort des langues. Je retrouve dans ce qu’il dit beaucoup d’étapes de ce processus d’extinction que je connaissait déjà, en milieu kabyle.
Ce livre doit être lu par chaque un d’autres nous, pour comprendre le sort qui attend notre langue si on se dépêche pas de lui garantir les conditions de sa survie
Un lien
http://www.tlfq.ulaval.ca/AXL/Langues/2vital_mortdeslangues.htm
L'EXTINCTION [ DES LANGUES ]
La notion d'extinction, plus métaphorique que celle de disparition, évoque adéquatement, pour l'imagination, ce que peut signifier le phénomène. Il s'agit d'un retrait total de la scène, concomitant, par définition, de celui des dern niers locuteurs, qui s'éteignent sans descendance. L'extinction d'une langue est donc celle des derniers vieillards qui la balbutiaient encore, ou parfois celle de toute la communauté qui la parlait, quels que soient les âges. L'extinction s'achève en substitution lorsque, ainsi qu'il arrive très fréquemment, les générations suivantes abandonnent complètement la langue dont il s'agit, et en adoptent une autre.
On peut donc dire qu'une langue est éteinte quand elle n'a plus de locuteurs de naissance, c'est-à-dire d'utilisateurs qui l'apprennent depuis le début de leur vie dans le milieu familial et social, et auxquels cet apprentissage confère ce qu'on peut appeler une compétence native ; cette dernière est elle-même définie comme une connaissance complète et une capacité d'usage spontané, qui font de la langue considérée un instrument de communication propre à toutes les circonstances de la vie quotidienne. Dans une telle perspective, une langue vivante sera définie comme celle d'une communauté qui renouvelle d'elle-même ses locuteurs de naissance ; et une langue morte, si l'on choisit de conserver ce terme, sera celle d'une communauté où la compétence native a totalement disparu, dans la mesure où les locuteurs de naissance n'ont transmis qu'imparfaitement leur savoir, leurs descendants transmettant à leur
tour une aptitude de plus en plus faible à parler et à comprendre l'idiome du groupe.
Deux conséquences peuvent être tirées de ces définitions. En premier lieu, l'implication individuelle de la notion de mort est ici absente. La mort d'une langue n'est certes pâs celle d'une communauté physique, puisqu'une société humaine qui abandonne une langue pour une autre ne meurt pas elle-même pour autant. Mais la mort d'une langue est un phénomène collectif. C'est le corps social tout entier qui cesse de parler cette langue. Même s'il est vrai que la mort des derniers locuteurs de naissance est un phénomène individuel, on doit considérer que l'extinction d'une langue qui disparaît avec eux est celle d'une communauté linguistique.
En second lieu, les derniers locuteurs de naissance à partir desquels s'amorce le processus d'extinction peuvent se trouver dans deux situations différentes : ils sont soit dans l'espace d'origine, où la langue est parlée comme patrimoine autochtone, soit dans un lieu d'immigration, où une communauté déplacée la conserve encore au sein d'un environnement qui parle une autre ou plusieurs autres langues. Une langue peut donc s'éteindre in situ, mais elle peut aussi s'éteindre en diaspora ; ce dernier cas est illustré par les exemples de communautés d'origine norvégienne ou hongroise vivant aux États-Unis depuis un siècle ou davantage, et chez lesquelles le norvégien ou le hongrois est, selon les individus, soit éteint, soit menacé
d'extinction.
L'EXTINCTION PAR ÉTAPES
Dans ce qui suit, je tenterai de caractériser les étapes d'un processus dont l'aboutissement dernier est la mort d'une langue. Je parlerai de précarisation à propos des étapes initiales, et d'obsolescence à propos des étapes antérieures à l'issue ultime. Pour référer d'une manière plus générale à l'ensemble du processus, j'emploierai d'autres notions, comme celle de délabrement, ou, prises méta riquement à partir de la géologie et du droit, celles d'érosion et de déshérence.
A SUIVRE