le journal hebdo
L'Espagne ne veut pas cautionner un musée en l'honneur de Mezian
La présence d'officiels espagnols lors de l'inauguration du musée consacré au Maréchal Mezian a indigné députés, intellectuels et société civile de l'autre côté de la Méditerranée. Et le ministre des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, n'a pas encore affronté les questions. Les anciens communistes espagnols et les petits partis catalans ont rué dans les brancards après l'annonce de la participation d'une délégation espagnole de haut niveau à l'inauguration du musée consacré au Maréchal Mezian à Beni Ensar, près de Nador.
Le gouvernement espagnol y était représenté par son ambassadeur, le socialiste Luís Planas, le chef d'Etat Major adjoint de l'Armée de Terre, le lieutenant général Barbudo et le coordinateur de la coopération espagnole au Maroc, Vicente Sellés. Il y avait aussi, et cela a beaucoup réjoui la presse de Melilia, le général Diaz de Villegas qui commande la place. Pour la première fois il avait traversé la frontière en voiture officielle revêtu de son uniforme de gala. D'autres fonctionnaires espagnols au Maroc, d'un niveau moins élevé, ont cependant décliné poliment l'invitation qui leur avait été faite par la famille Mezian. Mais, aussi surprenant que cela paraisse, les socialistes espagnols se sont aussi fâchés. Outre les commentaires de désapprobation que l'on attribue à María Teresa Fernández de la Vega, la vice-présidente du gouvernement, le parti socialiste (PSOE) a laissé transparaître sa mauvaise humeur. Carmen Hermosín, députée et présidente de la Commission des Affaires intérieures du Congrès, a adressé une question au ministre des Affaires étrangères, Miguel Ángel Moratinos.
« Méthodes criminelles »
« A quoi est due cette présence diplomatique au plus haut niveau ? », demande Hermosín. « Il est de notoriété publique que Mohamed Mezian fut l'un des instigateurs du coup d'Etat militaire de 1936 en Espagne », poursuit-elle. "Les atrocités qu'il a commises pendant la guerre civile et l'après-guerre sont prouvées". "Il a utilisé des méthodes criminelles (...) aussi bien avec les militaires (républicains) qu'avec les civils", conclut-elle. Au PSOE, ne pose pas des questions qui veut. Il faut l'approbation du groupe parlementaire pour pouvoir le faire. Hermosín l'a obtenue rapidement. Les députés socialistes ont ainsi exprimé leur mécontentement à leurs ministres des Affaires étrangères et de la Défense, responsables de la participation de haut niveau à l'inauguration du musée.
La Gauche Unie (ex-communistes) et ERC (nationalistes catalans républicains) ne se sont pas contentés d'une question aussi générale que celle formulée par Hermosín. Ils ont adressé au ministre et à la secrétaire d'Etat à la coopération, Leire Pajín, de multiples questions sur le financement par les Affaires étrangères de projets de la Fondation de la BMCE qui a construit le musée de Nador à la gloire de Mezian.
Un fonds alloué de gré à gré
Le problème n'est pas dans les sommes allouées -environ 426.000 euros pour deux programmes éducatifs dans le Rif- ni dans la nature des projets financés. Ce qui choque les députés de ces deux groupes, c'est que, contrairement aux récentes bonnes habitudes de transparence de la coopération espagnole, ces fonds ont été alloués de gré à gré, sans passer par un concours public que d'autres fondations ou ONG marocaines auraient pu solliciter, elles aussi, un financement pour des projets aussi bien ou, peut-être, mieux ficelés que ceux de la BMCE. Pendant ce temps, la société civile espagnole se mobilise pour dénoncer l'ignominie de l'envoi de l'ambassadeur et des généraux à Nador. L'information est largement débattue sur toutes sortes de forums et de blogs sur Internet. Plus important encore, les principaux chercheurs et académiciens qui travaillent sur le Maghreb ont adressé une lettre ouverte à Moratinos, publiée le mercredi 14 dans les colonnes d'El País. Le premier à signer était l'un des plus célèbres d'entre eux, Bernabé López. Moratinos prend son temps avant de se rendre au Parlement ou même de répondre par écrit aux députés. Devant la presse, il peut difficilement s'échapper. Interrogé lundi dernier au Luxembourg, le ministre à expliqué que Mezian était un "personnage" qui avait eu des liens étroits avec l'Espagne et le Maroc. Quant à l'ambassadeur Planas, a-t-il ajouté, "il a été invité par les autorités marocaines, il y est allé et rien de plus".
Un journaliste lui demanda alors si la politesse diplomatique l'obligeait à accepter toutes les invitations d'où qu'elles viennent, mais Moratinos quittait déjà la salle de presse et n'y a par conséquent pas répondu.
Dixit "Chakib Ben Moussa a été choisi comme ministre de l'Intérieur pour neutraliser le mouvement (...) et mène sa grande guerre contre Al Adl wal Ihssane", a jugé Nadia Yassine, la fille aînée d'Abdessalam Yassine, porte-parole officieuse de l'association
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www.mondeberbere.com