Representativité de la geste berbere.

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Je vous ai transcrit un texte on ne peut plus rare de l`enfant terrible de Tafrawt, l`un des monuments de la littérature francophone d`Afrique du Nord, Mohamed Khaïr-Eddine. Je vous souhaite bonne lecture!!!

1
Les grands ordonnateurs de la symbolique et de la rythmique berbère comme l`Haj Belaid et Sidi Hmad Ou Moussa n Tezrwalt, errants l`un et l`autre en cet espace mal défini et fumeux qu`est la consience hamaine, ont imprimé une poétique exemplaire à la geste sudique. Chez eux comptait, en même temps le verbe flamboyant, l`image striée de signifiants musicaux et mythologiques qui impliquait une vie faite d` expédients et d` ingrédients culturels où le cœur et la volonté s` alliaient pour donner à la mémoire sa totale complétude. En eux, hurlait l` essence de l` homme en pleine déréliction. Mais aussi notre altérité et cette errance mentale qui est précisément le lot du monde actuel.

A travers ces langages anciens, c`est à la fois Sumer et Babylone qui nous apostrophent. Quand Haj Belaid s`est rendu à la Mecque, à pieds semble-t-il, pour purifier comme tant d`autres et adorer le Ciel qu`il n`avait jamais cessé d`invoquer, il ne faisait que se prolonger poétiquement à la recherche d`une tension de pureté du monde actuel.

A l`époque, beaucoup de nos pays étaient colonisés. Nous avions depuis longtemps tourné le dos à la science. Et nul ne savait les gigantesques énergies que renfermaient nos sous-sols, objets actuels de contestations, de conflits fratricides et de grandes amertumes, sinon d`un gaspillage impardonnable.

L`Haj Belaid avait alors raison de s` abandonner complètement du langage. Il nous a laissé sa voix, ses rythmes et ses hantises.

Quant à Sidi Hmad Ou Moussa n Zaouite ( Tazerwalt), il n`a légué que des légendes abstraites mais très belles. Une autre poésie qui conforte l`homme dans son ascèse. C`était une sorte de Rimbaud de la dernière heure, celui du Harrar et d`Aden…Le Rimbaud souffrant mais prospectant des territoires aussi hostiles que l`envers d`illuminations rutilantes et hantées.

Sidi Hmad Ou Moussa et l`Haj Belaid étaient des quêteurs d`un homme nouveau, débarassé de ses résidus bestiaux. C`étaient des fils du soleil et, à ce titre, dignes de figurer dans l`archive moderne du monde. Au demeurant, ils nous hélaient de très loin, de très haut à l`instar de la croix du Sud, amie de piroguier de sembédioune, ce petit village de pêcheurs et d`artisans sénégalais connu pour sa simplicité et son acceuil fraternel.
Ils disaient la ritournelle sauvage
Sans arrogance sous l`arganier noueux
Et par le plissement hercynien et de la Terre…
Ils étaient frais comme des galets
Et bleus comme le sommeil.
L`un était Ouijjane, l`autre de Tazerwalt…
Ils disaient la ritournelle sauvage
et le si bel orage qui frémit dans les rémiges

Oui, ces deux Chleuhs étaient des immigrés de l` intérieur, pas du tout comparables de cette force d` appoint, à ces muscles humains qu` utilisent et usent sans vergogne les sociétés industrielles empêtrées dans un confort précaire, générateur d` aliénations mentales et détraqueur des lus solides psychismes. Leur errance n` était ni ostentatoire ni voulue, mais son exubérance même la rendait indispensable en ce sens qu` elle charriait une poésie magnifique et des rêves structurés qui corrigeaient l `existence dans ce qu` elle comportait de plus vil.

2

Nous parlerons plus des jeunes poètes berbères. Aujourd`hui, ils ne font plus confiance à l` oralité…ils écrivent. Mais des chanteurs talentueux comme Ammouri M`Bark les interprètent avec bonheur. Ce qui permet à tout le monde de les connaître car, il faut bien le dire, ces nouveaux poètes ne trouvent pas aisément un éditeur. Comme d`ailleurs d`autres poètes et écrivains de langue arabe et française.

Signalons tout de même l`existence des Editions Stouky, première initiative en son genre dans notre pays, courageuse et prometteuse. Mais qui délivrera ces jeunes créateurs de l`éditorialité ? Beaucoup d`entre eux redoutent un brutal refus… et, par conséquent, n`adressent pas ler maniscrit aux éditeurs. Nous leur conseillons donc d`étre courageux et leur répétons que Samuel Beckett lui-même, qui est un de nos plus précieux amis, s`était vu refuser par six éditeurs successifs le manuscrit Molloy… Mais c`est Jérôme Lindon, un autre ami, qui a fini par l`éditer. Ceci se passait il y a plus de trente ans. Personnellemt, j`ai eu pas mal de déboires avec les éditeurs…mais j`ai d`abord commencé par publier dans des revues… et ce sont les éditeurs qui ont fini par frapper à ma porte. Courage donc, poètes ! Car celui qui est habité par l`écriture ne doit avoir peur de rien…ou alors il abondonne la plume et caquet et il va faire autre chose.

3

Relativement à la poésie berbère, je présenterai aujoud`hui, dans le cadre de cette chronique, Brahim Akhiat dont j`ai traduit un fragment(…)
C`est ma viole, c`est ma guitare
qui me précèdent…
C`est mon cœur, c`est mon âme,
viciés du souvenir,
qui me précèdent…

Je vous salue, errants précaires !
La terre et l`œil boivent
très goulûment mes larmes.
Partir ! Je veux partir !…
Chercher mon père perdu, océanique,
en terres étranges…
un père jamais connu, jamais vu, qui s`en alla
très loin
Quand je n`étais que fœtus
Ains, il m`oublia dans le ventre de me mère.
Oh mère !
C`est ta larme que j`ai têté.
elle innonde encore mon sang mais j`imagine le père
sans issue et sans vision
frissonnant dans ces pays étranges.

Il faut croire que ce poème marveilleusement équilibré porte en soi toute la geste berbère… et très précisèment ces grands départs et ces non moins inopinés retours qui font que l`homme berbère s`est rendu libre au fil du temps et tout au long de l`Histoire agitée du Vieux Monde, d`où son nom d`Amazighe.

4

J`ai eu l`occasion de parler de deux groupes de chanteurs berbères : « Ousmane», groupe éclaté et duquel sort Ammouri Mbarek ; et « Izenzaren », sindé en deux également. Des groupes naissent et disparaissent à cause des dissensions internes parfois intolérables. Il en est ainsi de tout groupement, à commencer par les partis politiques et les plus représentatifs et certains syndicats et demeurant homogènes. Ces groupes de chanteurs berbères nous ont néanmoins réappris la musique ancestrale…qui n`est pas sans rapport avec l extrême tangibilité chinoise, tonkinoise et même japonaise. Nous avons donc l`aun registre neufs de référents capables de situer graduellement l`homme sur cette planète qu`il essaie en vain de dominer mais dont il ne fait à la longue qu`un vaste amas de ruines…Une nature plus morte que les fruits représentés sur certaines toiles de peintres connus et inconnus.

Réécoutez donc les chants de l`Haj Belaid et les cassettes de Ammouri Mbarek

Cela vous donnera du punch certainement.

Le journal almaghrib, le 7 décembre 1980.
 
Je vous ai transcrit un texte on ne peut plus rare de l`enfant terrible de Tafrawt, l`un des monuments de la littérature francophone d`Afrique du Nord, Mohamed Khaïr-Eddine. Je vous souhaite bonne lecture!!!( Ne tenez pas compte du premier texte car il est bourré de fautes!!!!)

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Les grands ordonnateurs de la symbolique et de la rythmique berbère comme l`Haj Belaid et Sidi Hmad Ou Moussa n Tezrwalt, errants l`un et l`autre en cet espace mal défini et fumeux qu`est la conscience hamaine, ont imprimé une poétique exemplaire à la geste sudique. Chez eux comptait, en même temps le verbe flamboyant, l`image striée de signifiants musicaux et mythologiques qui impliquait une vie faite d` expédients et d` ingrédients culturels où le cœur et la volonté s` alliaient pour donner à la mémoire sa totale complétude. En eux, hurlait l` essence de l` homme en pleine déréliction. Mais aussi notre altérité et cette errance mentale qui est précisément le lot du monde actuel.

A travers ces langages anciens, c`est à la fois Sumer et Babylone qui nous apostrophent. Quand l`Haj Belaid s`est rendu à la Mecque, à pieds semble-t-il, pour purifier comme tant d`autres et adorer le Ciel qu`il n`avait jamais cessé d`invoquer, il ne faisait que se prolonger poétiquement à la recherche d`une tension de pureté du monde actuel.

A l`époque, beaucoup de nos pays étaient colonisés. Nous avions depuis longtemps tourné le dos à la science. Et nul ne savait les gigantesques énergies que renfermaient nos sous-sols, objets actuels de contestations, de conflits fratricides et de grandes amertumes, sinon d`un gaspillage impardonnable.

L`Haj Belaid avait alors raison de s` abandonner complètement du langage. Il nous a laissé sa voix, ses rythmes et ses hantises.

Quant à Sidi Hmad Ou Moussa n Zaouite ( Tazerwalt), il n`a légué que des légendes abstraites mais très belles. Une autre poésie qui conforte l`homme dans son ascèse. C`était une sorte de Rimbaud de la dernière heure, celui du Harrar et d`Aden…Le Rimbaud souffrant mais prospectant des territoires aussi hostiles que l`envers d`illuminations rutilantes et hantées.

Sidi Hmad Ou Moussa et l`Haj Belaid étaient des quêteurs d`un homme nouveau, débarrassé de ses résidus bestiaux. C`étaient des fils du soleil et, à ce titre, dignes de figurer dans l`archive moderne du monde. Au demeurant, ils nous hélaient de très loin, de très haut à l`instar de la croix du Sud, amie de piroguier de sembédioune, ce petit village de pêcheurs et d`artisans sénégalais connus pour sa simplicité et son accueil fraternel.
Ils disaient la ritournelle sauvage
Sans arrogance sous l`arganier noueux
Et par le plissement hercynien et de la Terre…
Ils étaient frais comme des galets
Et bleus comme le sommeil.
L`un était de Ouijjane, l`autre de Tazerwalt…
Ils disaient la ritournelle sauvage
et le si bel orage qui frémit dans les rémiges

Oui, ces deux Chleuhs étaient des immigrés de l` intérieur, pas du tout comparables de cette force d` appoint, à ces muscles humains qu` utilisent et usent sans vergogne les sociétés industrielles empêtrées dans un confort précaire, générateur d` aliénations mentales et détraqueur des lus solides psychismes. Leur errance n` était ni ostentatoire ni voulue, mais son exubérance même la rendait indispensable en ce sens qu` elle charriait une poésie magnifique et des rêves structurés qui corrigeaient l `existence dans ce qu` elle comportait de plus vil.

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Nous parlerons plus des jeunes poètes berbères. Aujourd`hui, ils ne font plus confiance à l` oralité…ils écrivent. Mais des chanteurs talentueux comme Ammouri M`Bark les interprètent avec bonheur. Ce qui permet à tout le monde de les connaître car, il faut bien le dire, ces nouveaux poètes ne trouvent pas aisément un éditeur. Comme d`ailleurs d`autres poètes et écrivains de langue arabe et française.

Signalons tout de même l`existence des Editions Stouky, première initiative en son genre dans notre pays, courageuse et prometteuse. Mais qui délivrera ces jeunes créateurs de l`éditorialité ? Beaucoup d`entre eux redoutent un brutal refus… et, par conséquent, n`adressent pas leur manuscrit aux éditeurs. Nous leur conseillons donc d`être courageux et leur répétons que Samuel Beckett lui-même, qui est un de nos plus précieux amis, s`était vu refuser par six éditeurs successifs le manuscrit Molloy… Mais c`est Jérôme Lindon, un autre ami, qui a fini par l`éditer. Ceci se passait il y a plus de trente ans. Personnellement, j`ai eu pas mal de déboires avec les éditeurs…mais j`ai d`abord commencé par publier dans des revues… et ce sont les éditeurs qui ont fini par frapper à ma porte. Courage donc, poètes ! Car celui qui est habité par l`écriture ne doit avoir peur de rien…ou alors il abondonne la plume et caquet et il va faire autre chose.

3

Relativement à la poésie berbère, je présenterai aujoud`hui, dans le cadre de cette chronique, Brahim Akhiat dont j`ai traduit un fragment(…)
C`est ma viole, c`est ma guitare
qui me précèdent…
C`est mon cœur, c`est mon âme,
viciés du souvenir,
qui me précèdent…

Je vous salue, errants précaires !
La terre et l`œil boivent
très goulûment mes larmes.
Partir ! Je veux partir !…
Chercher mon père perdu, océanique,
en terres étranges…
un père jamais connu, jamais vu, qui s`en alla
très loin
Quand je n`étais que fœtus
Ainsi, il m`oublia dans le ventre de me mère.
Oh mère !
C`est ta larme que j`ai têté.
elle inonde encore mon sang mais j`imagine le père
sans issue et sans vision
frissonnant dans ces pays étranges.

Il faut croire que ce poème merveilleusement équilibré porte en soi toute la geste berbère… et très précisément ces grands départs et ces non moins inopinés retours qui font que l`homme berbère s`est rendu libre au fil du temps et tout au long de l`Histoire agitée du Vieux Monde, d`où son nom d`Amazighe.

4

J`ai eu l`occasion de parler de deux groupes de chanteurs berbères : « Ousmane», groupe éclaté et duquel sort Ammouri Mbarek ; et « Izenzaren », scindé en deux également. Des groupes naissent et disparaissent à cause des dissensions internes parfois intolérables. Il en est ainsi de tout groupement, à commencer par les partis politiques et les plus représentatifs et certains syndicats et demeurant homogènes. Ces groupes de chanteurs berbères nous ont néanmoins réappris la musique ancestrale…qui n`est pas sans rapport avec l extrême tangibilité chinoise, tonkinoise et même japonaise. Nous avons donc là un registre neuf de référents capables de situer graduellement l`homme sur cette planète qu`il essaie en vain de dominer mais dont il ne fait à la longue qu`un vaste amas de ruines…Une nature plus morte que les fruits représentés sur certaines toiles de peintres connus et inconnus.

Réécoutez donc les chants de l`Haj Belaid et les cassettes de Ammouri Mbarek

Cela vous donnera du punch certainement.

Le journal almaghrib, le 7 décembre 1980.
 
Mohammed Khaïr-Eddine
(ou Agoun'chich l'errant)
Mohammed Mazouz
Parimazigh n°1

«Derrière lui, la ville, le pays. Il les a quittés un matin le soleil ne s 'était pas encore pointé... La mort qui venait froisser ses draps alors qu'il était bébé, le faire rire ou pleurer..» (Le déterreur, p. 126)

Il disait : «Je désire trouver une phrase qui résume tout.» En deux mots on dira Khaïr-Eddine. Écrivain de refus, il l'a maintes fois prouvé dans ses écrits romans-poèmes. De Agadir, en passant par Corps négatif suivi de histoire d'un Bon Dieu, Soleil Arachide, Moi l'aigre, Le Déterreur, Ce Maroc !, Une odeur de mantèque, Une vie, un rêve, un peuple, toujours errants, la Résurrection des fleurs sauvages, Légende et vie d'Agoun'chich et enfin Mémorial, le même cri résonne à chaque fois, un cri qui résume le 'tout' «la beauté qu'il chantait, la révolte qui l'habitait et 1'insoumission dont il rêvait de vêtir ses frères en désespoir.» (revue Tifinagh n°9)
Ces oeuvres sont fortement marquées par le sud marocain dit «sudique» :

Sudique
que je crée par la pluie et les éboulis
que je transforme en lait nuptial pour des
noces de torrents(..)
Sudique
percée d'oubli soudain par des troupes ferventes
de poèmes
qui font éclater chaque pierre sous mes pieds
quand mon corps bée
entre des mains bleues
entre les flûtes
Sudique sur un pic miraculeux
couleuvre jeune récitant des piétinements sans histoire(..)
et ces tristes airs d'abandon et de haine
ces crieurs ces goumiers qui traînent
leur vie mortelle
ces Phéniciens ces nus voraces
Sudique de rutilance et de scorpions
sur tes seins enroulés fermes
et ce maudit esclave qui crache dans ton ombre.
(Ce Maroc !, Le Seuil, 1975, p. 29-31)


Ce Maroc l'obsédait, surtout pendant les années d'exil en France. Sa patrie, celle qui lui a tenu compagnie, était surtout la poésie, territoire qu'il arpentait sans se soucier des bienséances de la vie sociale. (In Le Monde des livres du 1er décembre 1995)

«Dans Agadir, disait-il, je remet tout en question : la politique, la famille, les ancêtres. Je crois qu'il faut faire tomber les vieilles statuts, tout changer par l'éducation du peuple (...) Je n'hésite pas à faire le procès de mon propre sang car il n'arrive pas à se dépêtrer de lui-même, à se transformer» (Ce Maroc !, op.cit. p.81) N'écrit-il pas dans Une vie, un rêve, un peuple, toujours errants : «Je renierai les Berbères qui auront pour du fric ou des espoirs inutiles trahi la fonction de ce monde.» Dans Moi l'Aigre, il rajoute : «Mais quelle est la goute de sperme qui a fait de moi un Berbère... [mais] les Berbères se sentent très proches des fous et des génies, ils ont la vérité fixée sur le front et ils corrigent la vie selon leur goût.» (p. 35)

Son sang est sa blessure, ce n'est pas sans raison que je m'exile ici. D'abord je voudrais faire un chemin à suivre. Et en même temps attirer l'attention du voleur et du volé, de crocodile et de la victime, des nouveaux sorciers de l'Afrique et des hypnotisés... (revue Souffle n°1, premier trimestre 1966, p. 7)
ma plaie
où seule l'abeille trouve des fleurs neuves
porte-moi loin de cet oubli
battant
et rampe
pays pays je plie bagages
ceux qui ajoutent du noir
à leur cellule
me voient partir
pays pays où seule la terre
se souvient
et hurle
quelle terreur couve
sous ta colère.
(Ce Maroc !, p. 21-22)


Son exil, il en parle à travers son vécu et à travers le quotidien. Agoun'chich est parti «... ce qui importe, ce qui prime tout le reste y compris ton existence et la mienne, c'est d'abord qu'on passe ici où là, de temps en temps, avec soi-même et avec les autres (...) cette harmonie fugitive qui vous condamne à vivre ou à périr (...) Cependant je marche ? je vais, je cours, je cherche sans relâche quelque chose qui me fasse désirer la vie» Agoun'chich (p. 68)
«Et j'erre
avec ma bombe sous l'aisselle,
banlieue foutue... oui j'erre
et je suis la nuit bleue
travaillé par le feu des enfers
et la braise pneumatique qui sangle la gravité des nuits...

mais cela ne s'écrit pas ! j'étais là fusillable,
Solo, toujours solo, chantant
en bus, métro et dans la rue or on me tire dessus !
Je sors donc mon couteau
et je me tue moi aussi
Épreuve des banlieues,
hypothétique cité
où personne ne vit
sa vie!

Suis-je orphelin
de ma terre oubliée
et dont pas même l'image
ne vient
effleurer mon affect ?»
(Extrait du Quasar II, Tifinagh n°8, déc. 1995)


Cette obsession du sud, qui est à l'oeuvre dans ses textes, procède à la fois d'un vécu au contact du terroir et d'un travail sur le langage. «Quand vous débarquez dans un pays que vous n'avez jamais vu ou que vous avez déserté depuis longtemps, ce qui vous frappe avant tout, c'est la langue que parlent les gens du cru». (Agoun'chich, p. 9) «Le Berbère oublia son écriture et une grande partie de son vocabulaire, car le premier soin du colonisateur fut à, tous les coups de le dépersonnaliser, le déposséder de ses racines, autrement dit, il tenta toujours de transformer radicalement le Berbère en un homme d'une race qu'il n'était pas, comme si l'on pouvait changer un pygargue en serpent de mer.» (Agoun'chich, p. 129)

L'errance s'inscrit dans un projet de réactivation d'un bonheur lié à un espace, dont les signes authentiques ont été effacés sous l'influence de diverses invasions. Le rôle de cette errance sert à dénoncer (la modernité sauvage), les changements que l'évolution mouvementée de l'histoire a fait subir à cet espace si singulier par sa nature et sa culture qui est le sud. (A. Tenkoul, Littérature marocaine d'écriture française, Casablanca, Éd Afrique Orient, 1985.)

L'Agoun'chich, ses sentiments restent partagés. Il se débattait avec lui-même entre deux rives... Il a vécu loin des projecteurs, «sa mort» - (pardon ! la mort c'est l'oubli) - va déterrer ce déterreur pour être lu et relu.

BIBLIOGRAPHIE

Agadir, 1967
Corps négatif, suivi d'Histoire d'un bon Dieu, 1968
Soleil arachide, 1969
Moi, l'aigre, 1970
Le Déterreur, 1973
Ce Maroc ! 1975
Une Odeur de Mantèque, 1967
Une vie, un rêve, un peuple, toujours errants, 1978
Résurrection des fleurs sauvages, 1981
Légende et vie d'Agoun'chich, 1984
 
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