Portraits de femmes

idaoutanane

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Fatima Sadiqi

Bien qu'elles soient peu nombreuses, (mais tout de même de plus en plus) discrètes pour certaines, sur ce post j'aimerai faire un "inventaire" de toutes ces femmes qui se battent pour la reconnaissance, la continuité et longévité de notre patrimoire


Fatima SADIQI

Qui est Fatima SADIQI ?

Je suis Professeur de l'Enseignenent Supéneur à l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès depuis 1986. En 1980, j'ai écrit ma thèse de troisième Cycle sur la morphosyntaxe du verbe dans la langue Amazighe et en 1982 j'ai écrit ma thèse de doctorat d'Etat sur la Phrase Complexe en Amazighe. La dernière a été la première thèse en anglais sur la syntaxe de 1'Amazighe marocain. Cette thèse a éte' publiée en 1986 sous le titre :" Studies in Berber Syntax the Complex Sentence" par la maison d'édition allemande Konigshaussen & Neumann. En plus de mon intérèt pour la morpho-syntaxe de l'Amazighe, je m'intéresse aussi à l'intersection «femmes/genre et langues» au Maroc, où le multilinguisme interagit avec beaucoup de variantes comme la classe sociale, le genre, le niveau d'éducation, etc. Je crois que le sort des femmes marocaines a toujours été lié à celui de la langue Amazighe. J'ai publié un livre en anglais dans ce sens en 2003 sous le titre Femmes, Genre et langues au Maroc.


Vous avez aussi publié un livre sur la grammaire Amazighe. En deux mots, qu'est-ce qui caractérise cette grammaire?

Ce livre a été écrit en français sous le titre Grammaire du Berbère et a été publié la première fois en I 997 La grammaire Amazighe est une grammaire très riche et peu connue ; c'est une grammaire où le verbe joue un rôle central de part sa nature agglutinative (le verbe attire un nombre impressionnant de particules grammaticaIes et peut constituer une phrase lui seul). L'étude de la grammaire Amazighe nous enseigne aussi sur beaucoup de questions linguistiques que les différentes théories du domaine n'ont pas su cerner d'une façon exhaustive comme la nature des particules verbales, leur mobilité, le sens et ses répercussions de cette mobilité très rare dans les langues naturelles, etc. .enfin, dans le contexte actuel, la grammaire de l'Amazighe est de plus en plus importante parce qu'on ne peut pas réussir le passage de cette langue à l'écrit ni son enseignement sans une connaissance réelle de sa grammaire : une langue est par définition un système grammatical et vice-versa. Bref, la grammaire Amazighe est une grammaire que tout chercheur ·linguiste et tout enseignant de la langue doit connaître et apprécier à son juste titre.


Dernièrement, vous avez abordé au premier Festival de la Culture Amazighe à Fès le rôle de la femme Amazighe dans la transmission de la culture. Cette transmission aux générations futures, n'est-t-elle pas en danger?

Dans toutes les cultures du monde les femmes, de part leur rôle central dans la constitution et pérennité' de la famille, ainsi que dans la socialisation des enfants, sont les porteuses par excellence des spécificités profondes des peuples et des sociétés. Ce constat est encore plus vrai dans les cultures fortement orales comme la nôtre. Dans le cas de l'Amazighe, une langue longtemps marginalisée et confinée au mode oral, ce sont les femmes, qui elles aussi ont été longtemps marginalisées juridiquement et confinées à l'analphabétisme, qui ont, beaucoup plus que les hommes, véhiculé la langue (et la culture) et, donc, assuré leur extraordinaire survie face à des langues et cultures beaucoup plus puissantes comme l'arabe et le français. La littérature orale marocaine, qui constitue un patrimoine national porteur de la singularité du marocain, est largement féminine de part ses genres (contes, chants), et les sujets qu'elle traite (mariage, henna, etc). La littérature orale Amazighe est une littérature forte, variée,très vivante aù Maroc. Les femmes ont toujours non seulement présentes dans cette littérature miais créatrices. Il Il est juste de dire que les femmes Amazighes sont les gardiennes de la langue et culture Amazighes. Maintenant, avec la scolarisaion croissante des femmes et l'entrée de l'Amazighe à l'école, Si on ne fait rien pour non seulement préserver la culture mais la valoriser socialement et culturellement, il y a risque de perdition d'un des piliers de la spécificité marocaine, sinon nord-africaine.


Comment la femme Amazighe assure-t-elle la dite transmission ?

Elles assurent cette transmission d'une façon spontanée; d'abord à travers leur comportement de tous les jours surtout dans le monde rural, puis à.. travers l'éducation de leurs enfants, et aussi dans leur participation à la vie artistique de leur douars, village ou villes.


Pour l'enseignement de l'Àmazighe, vous insistez beaucoup sur les contes, pourquoi?

L'enseignement de l'Arnazighe, comme celui de toute langue naturelle, se fait par le biais de la communication, de la grammaire, de la conjugaison, de l'écriture, etc. mais aussi le ludique (chants, poésie, devinette, jeu, etc. Le ludique est un moyen de faire aimer la langue enseignée à l'enfant en utilisant des moyens comme le chant et les jeux que l'enfant aime. A 'école, on peut à travers le ludique ,"adoucir" l'enseignement tout en instruisant l'enfant et en valorisant sa culture. Un conte est aussi un moyen d'elargir l'imagination de l'enfant.


A part les contes, quelles sont les autres genres de littérature Amazighes?

Il y a les chants (Amdyaz, Ahwash, etc.), les poèmes, les proverbes, les devinettes, etc. Et chaque genre couvre des" sous-genres » : il y a' par exemple, de nombreux types de chants, de poèmes, etc...


Comment voyez vous le futur de l'Amazighité au Maroc?

Je considère la promotion de l'Amazighe comme étant la promotion de la diversité culturelle, de la tolérance, des droits (linguistiques et autres) des personnes, et de la démocratisation du pays. La promotion de l'Amazighe a été entamée et ne peut plus revenir en arrière. En plus de la volonté politique, les efforts que le Ministère de l'Education Nationale et la société civile, notamment la Fondation BMCE, fournissent sont louables mais restent insuffisants ; les médias, les universités, etc. doivent suivre ; le devoir de conserver et valoriser l'Amazighité est celui de tous les marocains.

Interview réalisée par Rachid RAHA
pour le mensuel " le monde amazigh " No de juin 2005
Rabat
 
portrait de femme

Souss said:
Je crois même que c'est la femme de Moha ennaji

qu'est ce qu'on en a à faire, franchement!

cette dame aux propos intéressants par ailleurs lorsqu'il s'agit de morphosyntaxe élude une terrible question, lorsqu'elle aborde la question de l'alphabétisation: elle affirme, ce que nous pensons tous, que la femme est gardienne et " transmetteuse" de notre langue et culture. Tout le monde le reconnaît. Elle préconise donc qu'il faut aider la femme tamazight à se libérer de l'analphabétisme, ce que nous ne cessons de réclamer, la femme tamazight étant la principale victime de la marginalisation et du sous développement culturel et économique dans notre pays.

Mais cette aide à l'alphabétisation, dans quelle langue doit elle être menée? En langue arabe, comme c'est le cas actuellement, contre tout bon sens? Dans ce cas la femme tamazight ne profitera guère de son accession à l'écrit et à la lecture, elle restera allienée d'une culture étrangère à son environnement et ethnocidaire, pire elle y perdra son âme, son identité et sa culture.

Comme cette brave tachelhit que je connais à Agadir, ne parlant que tamazight, la transmettant de façon innée et naturelle à ses enfants et petits enfants, langue, contes et légendes, tout un patrimoine culturel ancestral, et lorsqu'elle a profité des cours d'alphabétisation en langue arabe c'est pour devenir gardienne de la mosquée du quartier et y accomplir le ménage, imposer la lecture du coran et l'arabisation à ses petits enfants.
 
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