Le Maroc a soif et continue à exporter de l’eau

Tisba

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La plaine du Souss et le risque d’une catastrophe écologique

La ville de Taroudant et sa région sont à la Une des médias. Elles font la triste actualité d’un été morne et étouffant : la découverte macabre a en effet propulsé au-devant de la scène la capitale des Saadiens, jusqu’ici cantonnée dans une timide discrétion et se nourrissant des souvenirs de la belle époque, celle de Taroudant comme centre de rayonnement culturel et artistique, carrefour de commerce et d’échange, un brassage d’ethnies générant des pratiques raffinées dans tous les domaines du quotidien (le tagine, le Malhoun...).
Derrière ses remparts séculaires, sereine à l’ombre des oliviers, Taroudant souhaitait une autre publicité. Ce crime crapuleux est une double agression. Contre une enfance innocente et contre une ville et une région réputées par leur calme et leur quiétude. Mais ce crime joue aussi comme indicateur des mutations sociologiques, fruit des bouleversements économiques que vit la région du Souss depuis quelques décennies déjà. La région étant plutôt célèbre comme exportatrice de main-d’œuvre, elle est devenue subitement un pôle économique, autour des fermes allant d’Oulad Taîma à Massa, instaurant un appel d’air pour un exode interne massif drainant des tribus entières des régions de Abada, Hmar, Alhaouz…voire de plus loin encore. Une nouvelle configuration est ainsi née, cassant rapidement et violemment les équilibres socio-économiques d’antan. Le tissu social traditionnel a été bousculé dans ses fondements avec l’apparition de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles couches sociales, avec des pratiques inédites dans la région : la criminalité, la prostitution organisée… Si la mine de charbon a été la figure emblématique de la fracture socio-culturelle du 19ème siècle européen, la ferme des agrumes est l’indice de la révolution sociale dans le Sous marocain.
Mais il s’agit d’une révolution aveugle non raisonnée qui apparaît aujourd’hui comme un délit écologique. A Taroudant, il ne s’agit pas seulement de huit cadavres anonymes dont on vient de se rendre compte, il y a aussi un autre cadavre : celui de toute une région qui agonise vidée de son eau par la faute du choix d’un programme capitaliste sauvage d’exploitation agricole inappropriée. La nouvelle bourgeoisie marocaine, post-indépendance, avide et cupide s’est lancée dans une réappropriation des terres de la région de Taroudant en jouant sur la misère des gens, la plupart étant immigrés en France ou à Casablanca et sur la complexité du statut juridique des terres pour créer des fermes gigantesques, ultramodernes destinées à l’agriculture de l’exportation. La région manquant d’eau, on a découvert une manne dans la richesse de la nappe phréatique. Très vite, le paysage a changé de configuration, un nouveau décor est né : des terres arides, on est passé à des plaines verdoyantes. De l’Arizona, on est passé à la Californie. Mais à quel prix et pour combien de temps. Une chimère. La performance, certes fut grandiose.
Des richesses ont été créées, de nouvelles notabilités ont émergé et se sont très vite imposées sur l’échiquier politique nationale, sans ancrage culturel ni héritage mémoriel : nous sommes à la fin des années 70 et début des années 80. Les élections sont devenues le lieu d’exercice de la nouvelle logique dévastatrice. La région connue pour son ancrage à gauche dans la mouvance issue de la résistance a vécu un formatage politique à l’image de qui est arrivé au paysage et à la nature. Aujourd’hui, ce modèle s’essouffle : il n’y a plus d’eau. La nappe phréatique, fruit d’un cumul générationnel de plusieurs siècles a été happée et exportée en Europe en moins de vingt ans. Maintenant à Sebt Gouerdane, le village emblème de boom factice, c’est presque le temps des ruines : on creuse à plus de 500 mètres pour rien. C’est la Lorraine après la fermeture des mines de charbon. Que fait-on alors ? Au lieu de tirer la sonnette d’alarme, on refait le même schéma un peu plus au nord, vers Oulad Berhil, à 40 km de Taroudant sur la route de Tizi N’test. C’est le nouvel Eldorado de la bourgeoisie qui ne veut pas lâcher le filon d’or. On achète des terres chez des paysans pauvres et on les transforme en fermes exportant des tomates et du raisin vers l’Europe. Alors que notre pays manque cruellement d’eau, on s’acharne à exporter…de l’eau en Europe : la tomate, le raisin, l’orange…ne sont-ils pas constitués à hauteur de 60% d’eau ? L’eau de cette généreuse plaine du Souss qui verra bientôt son équilibre bioécologique détruit.
Si on ajoute à cela le modèle de tourisme de luxe dominant dans la région (la consommation en eau potable d’un hôtel en une nuit à Agadir, par exemple, équivaut aux besoins d’une famille pour un an), on se rend compte de l’ampleur de la catastrophe écologique qui s’annonce.
Espérons que la mort des petits enfants de Taroudant ne sera pas vaine et que ce choc permettra le réveil des consciences pour interroger un type de développement meurtrier et le renvoyer au ban des accusés.


Mohamed BENARBIA

Libération, Maroc

[ Edité par Tisba le 2/9/2004 13:26 ]
 
il y a beaucoup trop de non-dits dans cet article, mais on pourra résumer cela comme ça : tant que le Souss n'intéressait que les Soussis, il n'y avait pas tous ces problèmes sociaux, écologiques et économiques.

on sait très bien qui sont ces nouveaux "grand propriétaires" de même que l'origine géographique et ethnique de cet "exode interne."
 
j'aime bien le style de l'article qui fait dans le mélange des genres : entre le "crime crapuleux" (et/ou magico-religieux, sait-on jamais... ah ces Soussis, tous des marabouts, hein ?), la prostitution et l'écologie... mais il n'a rien dit finalement.
 
Tisba a écrit :
Question : Y-a t-il des systémes d'irrigation qui ontété mis en place dans le Souss ?

j'ai lu quelque part que la politique maladroite menée par Hassan II avait fait considérablement baisser le niveau de la nappe phréatique dans le Souss, c'est tout ce que je peux dire sur le sujet.
 
Schtrompf_i_mqorn a écrit :
ah ces Soussis, tous des marabouts, hein ?), la prostitution et l'écologie... mais il n'a rien dit finalement.

Qu'on se méprenne pas, c'est pas ce que je sous entendait en diffusant l'article, je voulait juste attirer l'attention sur les pénuries d'eau, maintenant l'auteur évoque les meurtres commis récemment à taroudant (Pas vraiment en rapport avec le sujet principal), bon.... :)

[ Edité par Tisba le 2/9/2004 14:20 ]
 
L'auteur s'est livré un exercice de style tout a fait desolant et disons le ,tres scolaire.
On apprend rien dans cet article le probleme de l'eau on le connait depuis des lustres ,j'avais d'ailleurs posté un sujet dessus sut ce site.Alors pourquoi mettre en perspective des sujets totalement independants les uns des autres...je vous le demande.
 
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