La dernière décision d'Ahmed Boukous visant à écarter quatre directeurs de centre cache l'hégémonisme naissant de celui qui a remplacé Mohamed Chafik à la tête de l'IRCAM.

Le 28 juillet 2006, au siège de l'IRCAM (Institut royal pour la culture amazighe). Quatre directeurs de recherches (en même temps directeurs de centres) sont convoqués, l'un après l'autre, par le recteur de l'Institut : Ahmed Boukous. Il les informe froidement qu'il a décidé de mettre fin à leur mission à la tête de leurs centres respectifs. Aucun d'eux ne s'attendait à cela. Certains avaient déjà commencé des programmes de recherches avec des organismes marocains et étrangers et étaient bien avancés dans leurs travaux. Mais la décision de M.Boukous est prise et les quatre chercheurs concernés sont mis devant le fait accompli. Il s'agit de : Jilali Saïb (directeur du Centre de recherche didactique et des programmes pédagogiques), Lahbib Zenkouar (directeur du Centre des Etudes informatiques et de communication), El Houssine Ouazzi (directeur du Centre des études historiques et environnementales), Belaïd Boudriss (directeur du Centre des études didactiques et pédagogiques). Ils ne comptent pas en rester là, mais pour l'instant, ils refusent de divulguer la forme que prendrait leur réaction, face à ce que certains d'entre eux considèrent comme une "aberration". La décision de M.Boukous a été prise le 28 juillet 2006, un vendredi. Et exceptionnellement, le recteur a décidé, ce même jour, de fermer l'Institut pour cause de congé annuel. Exceptionnellement, parce que l'IRCAM ferme, en principe, du 1er au 30 août. Selon une source de l'Institut royal, M.Boukous voulait ainsi éviter toute protestation éventuelle des chercheurs écartés. D'autant que ces derniers sont formels : la décision du recteur est abusive, car elle va à l'encontre des dispositions du règlement intérieur (RI) de l'IRCAM selon lesquelles le recteur doit consulter les membres des centres et choisir parmi eux un directeur de centre. Au lieu de cela, M. Boukous a décidé de recourir à un appel à candidature, en violation, là encore, du règlement intérieur de l'Institut royal. « A aucun moment le RI ne prévoit une telle procédure », souligne un chercheur. Pire, le recteur de l'IRCAM a chargé Brahim Akheyyat, un commerçant qui a pour seul diplôme une licence en … mathématiques, de faire des recommandations pour le recrutement des chercheurs qui remplaceront les universitaires écartés. Pourquoi Akheyyat ? « Parce qu'il dirige l'Amrec (Association marocaine pour la recherche et les échanges culturels, fondée en 1967, où Ahmed Boukous a milité », assure un membre du Conseil d'administration. Ces histoires de copinage se retrouvent au sein même de l'IRCAM et touchent son fonctionnement. L'Amrec est aussi l'association qui bénéficie de l'aide financière la plus importante de l'IRCAM, malgré son manque de dynamisme par rapport à d'autres associations, plus jeunes et moins "notabilisées", notamment au Rif et au Moyen-Atlas. Autre exemple. Curieusement, sur les six directeurs de centres de recherches que compte l'IRCAM, deux chercheurs ont échappé à la "purge" conduite par M.Boukous : Mme Fatima Boukhriss (Centre de l'aménagement linguistique) et M'hamed Sallou (Centre des études artistiques). La première n'est autre que l'épouse de Houcine El Moujahid, secrétaire général de l'IRCAM et l'homme le plus proche de M.Boukous. Le second, lui, est un membre dirigeant du PPS, très proche du ministre de la Communication, Nabil Benabdellah. C'est celui-ci qui a nommé, il y a moins d'un an … M.Boukous à la tête de la Commission d'appui et de soutien à l'audiovisuel … Selon plusieurs membres du Conseil d'administration de l'IRCAM, le recteur aurait des ambitions hégémoniques au sein de l'IRCAM. Juste après avoir écarté les directeurs des centres, il a annoncé qu'il se contenterait de trois centres seulement. Son vieux projet de "structuration", maintes fois refusé par Mohamed Chafik et par la majorité des membres du conseil d'administration, vise à "engloutir" les domaines de recherche en les cantonnant dans trois ou quatre "structures" qu'il maîtriserait, voire dominerait. Est-ce cela l'objectif initial de l'IRCAM, ce projet très … royal ?
Omar Brouksy
Le Journal Hebdo