Al-Manar interdite en Europe et aux Etats-Unis
LE MONDE | 20.12.04 | 14h52
La chaîne de télévision du Hezbollah accuse Washington de "terrorisme".
Les états-unis ont annoncé, vendredi 18 décembre, avoir classé Al-Manar, la chaîne de télévision satellitaire du Hezbollah chiite libanais, parmi les organisations terroristes, ce qui a entraîné aussitôt sa disparition des écrans américains. Cette décision est intervenue après celle du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) français, qui a résilié la convention signée avec la chaîne Al-Manar l'autorisant à diffuser sur la France via l'opérateur européen Eutelsat. Pour Al-Manar, dont la direction a réagi par un communiqué, la décision américaine relève du "terrorisme intellectuel car elle censure un média qui défend un point de vue et une cause : celle des Arabes et des musulmans".
Le gouvernement libanais a condamné les mesures de Paris et de Washington contre la chaîne, et sa qualification de "média terroriste" par le département d'Etat américain. Le ministre libanais de l'information, Elias Ferzli, a affirmé qu'il s'agissait d'une "tentative de faire taire toute voix qui s'oppose à Israël, en la qualifiant de terroriste". Il a ajouté que le gouvernement libanais, "suite à une recommandation de la commission parlementaire des affaires étrangères, étudie avec minutie la possibilité de prendre des mesures de rétorsion envers des médias américains et français".
"NOUVELLE ÈRE"
Pour l'ambassadeur du Liban à Washington, Farid Abboud, "il est inacceptable de censurer un média juste parce qu'il défend des thèses auxquelles il croit en prenant partie dans le conflit israélo-arabe". Le quotidien libanais As-Safir souligne la "concomitance des mesures américaine et française"et conclut qu'en faisant taire Al-Manar, les deux pays veulent qu'il n'y ait plus, au sujet du Proche-Orient, "qu'un seul son de cloche : celui d'Israël".
Dans son communiqué, la direction d'Al-Manar estime que la qualification de la chaîne, par les Etats-Unis, d'organisation "terroriste" "n'est que l'inauguration d'une nouvelle ère. Celle de la réduction au silence, au nom de la lutte contre le terrorisme, de toute voix ou média qui ose critiquer Israël et qui prend fait et cause pour le peuple palestinien", a indiqué la direction de la chaîne du Hezbollah.
Reporters sans frontières (RSF) s'est démarqué de l'interdiction d'Al-Manar en France. La censure d'un média n'est "jamais la bonne solution", a déclaré l'organisation de défense des journalistes, dans un communiqué. - (AFP, Reuters.)
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 21.12.04