16.10.2005 | 12h00
Des feuilletons mélodramatiques, satiriques et historiques
La boulimie télévisuelle atteint des proportions inquiétantes au cours du mois de Ramadan. Scotchés devant l'écran, les familles vivent au rythme des rêves, des passions et des histoires plus ou moins bien inspirés. Pour ce mois sacré, les chaînes de télévision arabes se sont livrées à une véritable opération de séduction dans le but d'attirer et de capter l'attention du téléspectateur.
Les maisons de productions se sont mobilisées longtemps à l'avance pour offrir aux téléspectateurs arabes, avides de nouveautés, de feuilletons et de spectacles, des morceaux de choix. Question production, ce sont encore les Egyptiens et les Syriens qui s'accaparent la part du lion cette année. Les Egyptiens, à eux seuls, ont produit 65 feuilletons, soit l'équivalent de 1500 heures de télévision pour un coût total de 87 millions de dollars.
Parmi ces feuilletons, il y a lieu de citer "Al morsa wa al bahhar". Tourné entre Chypre, la Grèce, l'Italie, l'Espagne, le Maroc (à Chefchaouen, précisément) et l'Egypte, ce feuilleton, qu'on peut voir sur la chaîne nationale 2M, est une parfaite illustration de la maîtrise de cet art par le pays des Pharaons. Comme son nom l'indique, les péripéties de ce feuilleton, dans lequel Yahia Al Fakharani campe le rôle principal, se déroulent dans l'univers marin.
"Li attarowati hissabat oukhra", programmé quotidiennement à 19h sur 2M est un autre exemple de ces feuilletons à succès que les Egyptiens proposent pour ce Ramadan. La recette en est simple : une histoire à multiples rebondissements, la lutte entre le bien et le mal, le méchant qui abuse de ses pouvoirs avant que sa conscience ne se réveille et qu'il se repent. Les couche-tard peuvent se régaler en regardant "Ahlam Adiya" (Rêves ordinaires).
Ce feuilleton, diffusé également sur 2M, évoque sans détours la situation des malades mentaux et de ceux qui n'obéissent plus aux critères de normalité de la société. Beaucoup de sensibilité et d'émotion se dégagent de ce film qui raconte l'histoire d'une jeune fille qui, après avoir été "normale", est retombée dans une grande léthargie rejetée et mal vue par son entourage. C'est un médecin qui arrive finalement à dénouer les fils de ce complexe psychologique. A saluer, la superbe prestation de l'actrice Yousra.
La TVM propose, pour sa part, deux feuilletons égyptiens. Al Harafich et Touba (le repentir).
C'est l'histoire d'un petit employé qui rêve de fortune et qui, grâce à un concours de circonstances, s'empare de l'argent des trafiquants de drogue. Il monte alors un empire financier.
La vengeance du trafiquant est terrible, mais comme dans tous les feuilletons égyptiens, le happy end est de rigueur. Parmi les autres feuilletons qui rencontrent un succès certain dans d'autres chaînes satellitaires, il y a lieu de citer, "Al nar hadia", qui revisite le thème de l'importance des liens familiaux dans un environnement en totale mutation et dans lequel les valeurs se perdent.
Les téléspectateurs peuvent aussi regarder "Ahlam Sara" (rêves heureux), un feuilleton qui évoque les aléas et les épreuves de la vie et la possibilité d'en sortir vainqueur ou encore "ahlamna al hilwa" (nos beaux rêves), un feuilleton qui évoque le rôle du travail et de la persévérance pour concrétiser ses rêves.
Si les Egyptiens sont passés maîtres dans l'art du mélodrame, les Syriens excellent, pour leur part, dans le genre historique. A titre d'exemple, on peut citer "Moulouk attawaif" (Les Rois des Taifas), une excellente série qu'on peut voir sur la chaîne 2M, à 13 h00 et 03 h00. Ce feuilleton revient sur une partie importante de l'histoire des Musulmans en Andalousie, celle qui a précédé le déclin et la fin d'un empire.
Ces Etats minuscules en conflit permanent vont être sauvés dans un premier temps grâce à l'intervention musclée de Youssef Ibn Tachfine qui a réussi à pacifier et à unifier les frères ennemis. Le poète et prince Al Mouatamid Ibn Abbad sera emprisonné et exilé à Aghmat.
Mais si le feuilleton évoque des faits historiques et le rôle décisif des Almoravides et de leur chef charismatique au cours de cette période cruciale de l'histoire du monde musulman, la série sert aussi de trame de fond à la mise à nu de problèmes et drames sociaux qui transcendent le temps et l'espace.
Tourné en grande partie à Ouarzazate, le film est la troisième partie d'un quartette dédié à l'Andalousie.
"Saqr Koreich" et "Rabiî Kortoba" en ont constitué les deux premières parties. Plusieurs acteurs marocains participent à ce feuilleton écrit par Walid Seif et mis en scène par Hatim Ali. C'est le cas notamment de Mohamed Miftah qui incarne le rôle du poète rusé Ibn Ammar, de Rabiî El Kati, Ali Ettaleb, Mohamed Belhisi ou encore Mohamed El Khalfi.
L'Andalousie semble être une source intarissable pour les réalisateurs jordaniens puisqu'ils proposent pour ce mois un feuilleton télévisé intitulé "Les Almoravides et l'Andalousie" et qui cerne, là aussi, la période où l'Andalousie est devenue bien fragile, en butte à diverses convoitises. Un sauveur viendra du Maroc et établira l'ordre et la paix. Le feuilleton est aussi l'occasion d'évoquer la célèbre bataille de Zalaka ; les inquisitions et les guerres de la Reconquistas.
Les acteurs qui campent les différents rôles viennent d'Egypte, d'Arabie Saoudite, de Tunisie, du Liban et du Maroc (Fatima Kheir, Siham Assif, Rachid El Ouali, Mohamed Attifi et Fadwa Mamoun).
Sur les chaînes du pays du Golfe, la célèbre série Tash ma tash, connaît un succès indéniable depuis sa création en 1993.
Ce feuilleton saoudien qui évoque les maux de la société est toujours aussi bien suivi. Diffusée tous les soirs de Ramadan depuis douze ans déjà, cette série "nous conduit à cette triste vérité : la réalité est une vaste rigolade que nous avons tous contribué à forger, mais que nous n'avons ni le droit ni le pouvoir de changer.
Nous n'avons que le droit de regarder des acteurs jouer nos erreurs et d'entendre nos voix au travers des leurs", comme l'avait souligné le critique littéraire Mohammed al-Abbas dans les colonnes du quotidien Al-Riyâd.
Dramatique, historique, satyrique, la programmation ramadanesque ne lésine ni sur les moyens ni sur la quantité. Le but étant de satisfaire tous les goûts.
__________________________________
Une série, plusieurs dialectes
Les dialectes arabes foisonnent dans une série égyptienne de 30 épisodes. Le projet aura une suite plus importante, pourvu que cette première partie ait du succès auprès des téléspectateurs arabes.
A l'initiative d'une maison de production égyptienne, les téléspectateurs arabes seront, pour la première fois, au rendez-vous, pendant ce mois de Ramadan, avec une production originale, qui consiste à associer 5 pays dans une même série. La maison de production égyptienne Studio 13 a voulu ainsi créer une série de 30 épisodes dans différents pays arabes, notamment la Syrie, le Soudan, l'Arabie Saoudite, l'Egypte et le Maroc. Il s'agit d'une comédie satirique de 6 épisodes de 26 minutes chacun qui traite de sujets de société, tels les crédits vacances, le fanatisme pour le football, la bureaucratie…
Les scénarios, qui sont à l'origine égyptiens, se font adapter à la culture du pays concerné. Un grand effort a été fourni dans le rapprochement des dialectes.
Le staff technique est entièrement marocain, dont le réalisateur, qui n'est autre que le jeune Ali Tahiri et une panoplie d'acteurs marocains, dont Abdallah Didane, Sanae Akroud, Aicha Sajid.
La maison de production égyptienne avait proposé la Tunisie, avant que le réalisateur Tariq Osmane, qui avait tourné à Casablanca plusieurs spots publicitaires et émissions pour la télé, ne soutienne l'idée d'opter plutôt pour le Maroc. Le tournage de la partie Maroc, qui a eu lieu 15 jours durant dans plusieurs sites à Casablanca, vient d'être achevé cette semaine. Un travail de pré-montage a eu lieu au Maroc avant le montage final en Egypte.
"Cette production est en quelque sorte une aventure. Le seul évaluateur sera le spectateur arabe. A l'exception du dialecte égyptien et, dans une moindre mesure, du dialecte syrien, les autres ne sont pas très familiers", note Tahiri.H.M.
Khadija Alaoui | LE MATIN
Des feuilletons mélodramatiques, satiriques et historiques
La boulimie télévisuelle atteint des proportions inquiétantes au cours du mois de Ramadan. Scotchés devant l'écran, les familles vivent au rythme des rêves, des passions et des histoires plus ou moins bien inspirés. Pour ce mois sacré, les chaînes de télévision arabes se sont livrées à une véritable opération de séduction dans le but d'attirer et de capter l'attention du téléspectateur.
Les maisons de productions se sont mobilisées longtemps à l'avance pour offrir aux téléspectateurs arabes, avides de nouveautés, de feuilletons et de spectacles, des morceaux de choix. Question production, ce sont encore les Egyptiens et les Syriens qui s'accaparent la part du lion cette année. Les Egyptiens, à eux seuls, ont produit 65 feuilletons, soit l'équivalent de 1500 heures de télévision pour un coût total de 87 millions de dollars.

Parmi ces feuilletons, il y a lieu de citer "Al morsa wa al bahhar". Tourné entre Chypre, la Grèce, l'Italie, l'Espagne, le Maroc (à Chefchaouen, précisément) et l'Egypte, ce feuilleton, qu'on peut voir sur la chaîne nationale 2M, est une parfaite illustration de la maîtrise de cet art par le pays des Pharaons. Comme son nom l'indique, les péripéties de ce feuilleton, dans lequel Yahia Al Fakharani campe le rôle principal, se déroulent dans l'univers marin.
"Li attarowati hissabat oukhra", programmé quotidiennement à 19h sur 2M est un autre exemple de ces feuilletons à succès que les Egyptiens proposent pour ce Ramadan. La recette en est simple : une histoire à multiples rebondissements, la lutte entre le bien et le mal, le méchant qui abuse de ses pouvoirs avant que sa conscience ne se réveille et qu'il se repent. Les couche-tard peuvent se régaler en regardant "Ahlam Adiya" (Rêves ordinaires).
Ce feuilleton, diffusé également sur 2M, évoque sans détours la situation des malades mentaux et de ceux qui n'obéissent plus aux critères de normalité de la société. Beaucoup de sensibilité et d'émotion se dégagent de ce film qui raconte l'histoire d'une jeune fille qui, après avoir été "normale", est retombée dans une grande léthargie rejetée et mal vue par son entourage. C'est un médecin qui arrive finalement à dénouer les fils de ce complexe psychologique. A saluer, la superbe prestation de l'actrice Yousra.
La TVM propose, pour sa part, deux feuilletons égyptiens. Al Harafich et Touba (le repentir).
C'est l'histoire d'un petit employé qui rêve de fortune et qui, grâce à un concours de circonstances, s'empare de l'argent des trafiquants de drogue. Il monte alors un empire financier.
La vengeance du trafiquant est terrible, mais comme dans tous les feuilletons égyptiens, le happy end est de rigueur. Parmi les autres feuilletons qui rencontrent un succès certain dans d'autres chaînes satellitaires, il y a lieu de citer, "Al nar hadia", qui revisite le thème de l'importance des liens familiaux dans un environnement en totale mutation et dans lequel les valeurs se perdent.
Les téléspectateurs peuvent aussi regarder "Ahlam Sara" (rêves heureux), un feuilleton qui évoque les aléas et les épreuves de la vie et la possibilité d'en sortir vainqueur ou encore "ahlamna al hilwa" (nos beaux rêves), un feuilleton qui évoque le rôle du travail et de la persévérance pour concrétiser ses rêves.
Si les Egyptiens sont passés maîtres dans l'art du mélodrame, les Syriens excellent, pour leur part, dans le genre historique. A titre d'exemple, on peut citer "Moulouk attawaif" (Les Rois des Taifas), une excellente série qu'on peut voir sur la chaîne 2M, à 13 h00 et 03 h00. Ce feuilleton revient sur une partie importante de l'histoire des Musulmans en Andalousie, celle qui a précédé le déclin et la fin d'un empire.
Ces Etats minuscules en conflit permanent vont être sauvés dans un premier temps grâce à l'intervention musclée de Youssef Ibn Tachfine qui a réussi à pacifier et à unifier les frères ennemis. Le poète et prince Al Mouatamid Ibn Abbad sera emprisonné et exilé à Aghmat.
Mais si le feuilleton évoque des faits historiques et le rôle décisif des Almoravides et de leur chef charismatique au cours de cette période cruciale de l'histoire du monde musulman, la série sert aussi de trame de fond à la mise à nu de problèmes et drames sociaux qui transcendent le temps et l'espace.
Tourné en grande partie à Ouarzazate, le film est la troisième partie d'un quartette dédié à l'Andalousie.
"Saqr Koreich" et "Rabiî Kortoba" en ont constitué les deux premières parties. Plusieurs acteurs marocains participent à ce feuilleton écrit par Walid Seif et mis en scène par Hatim Ali. C'est le cas notamment de Mohamed Miftah qui incarne le rôle du poète rusé Ibn Ammar, de Rabiî El Kati, Ali Ettaleb, Mohamed Belhisi ou encore Mohamed El Khalfi.
L'Andalousie semble être une source intarissable pour les réalisateurs jordaniens puisqu'ils proposent pour ce mois un feuilleton télévisé intitulé "Les Almoravides et l'Andalousie" et qui cerne, là aussi, la période où l'Andalousie est devenue bien fragile, en butte à diverses convoitises. Un sauveur viendra du Maroc et établira l'ordre et la paix. Le feuilleton est aussi l'occasion d'évoquer la célèbre bataille de Zalaka ; les inquisitions et les guerres de la Reconquistas.
Les acteurs qui campent les différents rôles viennent d'Egypte, d'Arabie Saoudite, de Tunisie, du Liban et du Maroc (Fatima Kheir, Siham Assif, Rachid El Ouali, Mohamed Attifi et Fadwa Mamoun).
Sur les chaînes du pays du Golfe, la célèbre série Tash ma tash, connaît un succès indéniable depuis sa création en 1993.
Ce feuilleton saoudien qui évoque les maux de la société est toujours aussi bien suivi. Diffusée tous les soirs de Ramadan depuis douze ans déjà, cette série "nous conduit à cette triste vérité : la réalité est une vaste rigolade que nous avons tous contribué à forger, mais que nous n'avons ni le droit ni le pouvoir de changer.
Nous n'avons que le droit de regarder des acteurs jouer nos erreurs et d'entendre nos voix au travers des leurs", comme l'avait souligné le critique littéraire Mohammed al-Abbas dans les colonnes du quotidien Al-Riyâd.
Dramatique, historique, satyrique, la programmation ramadanesque ne lésine ni sur les moyens ni sur la quantité. Le but étant de satisfaire tous les goûts.
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Une série, plusieurs dialectes
Les dialectes arabes foisonnent dans une série égyptienne de 30 épisodes. Le projet aura une suite plus importante, pourvu que cette première partie ait du succès auprès des téléspectateurs arabes.
A l'initiative d'une maison de production égyptienne, les téléspectateurs arabes seront, pour la première fois, au rendez-vous, pendant ce mois de Ramadan, avec une production originale, qui consiste à associer 5 pays dans une même série. La maison de production égyptienne Studio 13 a voulu ainsi créer une série de 30 épisodes dans différents pays arabes, notamment la Syrie, le Soudan, l'Arabie Saoudite, l'Egypte et le Maroc. Il s'agit d'une comédie satirique de 6 épisodes de 26 minutes chacun qui traite de sujets de société, tels les crédits vacances, le fanatisme pour le football, la bureaucratie…
Les scénarios, qui sont à l'origine égyptiens, se font adapter à la culture du pays concerné. Un grand effort a été fourni dans le rapprochement des dialectes.
Le staff technique est entièrement marocain, dont le réalisateur, qui n'est autre que le jeune Ali Tahiri et une panoplie d'acteurs marocains, dont Abdallah Didane, Sanae Akroud, Aicha Sajid.
La maison de production égyptienne avait proposé la Tunisie, avant que le réalisateur Tariq Osmane, qui avait tourné à Casablanca plusieurs spots publicitaires et émissions pour la télé, ne soutienne l'idée d'opter plutôt pour le Maroc. Le tournage de la partie Maroc, qui a eu lieu 15 jours durant dans plusieurs sites à Casablanca, vient d'être achevé cette semaine. Un travail de pré-montage a eu lieu au Maroc avant le montage final en Egypte.
"Cette production est en quelque sorte une aventure. Le seul évaluateur sera le spectateur arabe. A l'exception du dialecte égyptien et, dans une moindre mesure, du dialecte syrien, les autres ne sont pas très familiers", note Tahiri.H.M.
Khadija Alaoui | LE MATIN