La darija pour apprendre à lire

agerzam

Administrator
· C’est le pari de la maison d’édition Khbar bladna

· Celle-ci vient de produire un livre en arabe dialectal


KHBAR bladna est une maison d’édition particulière à bien des égards. Elle ne manque pas depuis sa création d’assister aux événements culturels. A commencer par le salon du livre dont elle est l’un des habitués.
Elle publie un hebdomadaire original. D’abord parce qu’il est gratuit. Ensuite par la langue utilisée, l’arabe dialectal ou darija dont il existe peu de supports écrits. Dernier projet en date, l’édition d’un livre en darija, écrit par Youssef Amine Elalamy «tkarkib nab», dont une traduction approximative serait «bavardages». Il s’agit d’un recueil de personnages écrit en prose et illustré par des images du même auteur.

Le livre, qui fait 125 pages, est mis à la vente à la modique somme de 10 DH. «Le but de Khbar bladna est d’aider à développer l’esprit de lecture», note Elena Prentice, une Tangéroise d’adoption et artiste peintre de profession qui est à la base de ce projet. Son objectif est d’apprendre à lire en accrochant les lecteurs, «il faut d’abord s’habituer à la lecture, ensuite on pourra lire dans n’importe quelle langue», souligne-t-elle. Prentice a mis en place une association à but non lucratif qui se charge de récolter des fonds pour financer le projet.

L’équipe de Khbar bladna est composée d’une dizaine de personnes, dont certains sont des bénévoles. Le succès de la publication ne s’est pas fait attendre. La formule allie la facilité de lecture à des genres attrayants, comme les histoires de la tradition populaire délivrées en feuilletons. Khbar bladna est distribué gratuitement, «bla flouss» comme l’aime à préciser Prentice, et pas seulement à Tanger mais aussi dans d’autres villes du pays. Elle vient de se doter d’un site Internet. Encore en construction, on peut par contre y télécharger à l’adresse khbarbladna.org le dernier numéro de l’hebdomadaire «dariji».

La version papier du journal est disponible dans des centres de bienfaisance, des refuges pour femmes, et dans d’autres centres sociaux. La revue inclut des rubriques dédiées à l’information et à la santé. «Le dialectal permettrait de réintégrer dans la société instruite bon nombre de personnes qui ne sont pas allées à l’école», explique Prentice qui y voit un vrai instrument de promotion sociale. Khbar bladna s’est forgée une réputation de véritable maison d’édition.

En plus du dernier livre d’Elalamy, elle a à son actif diverses publications dont un essai de grammaire pour la darija et des histoires tirées des contes des mille et une nuits. L’éditeur a aussi publié dernièrement un recueil de poèmes en dialectal de Fouad Lemseyah illustré par des dessins de Fouad Bellamine. L’édition s’est faite en collaboration avec la maison de la poésie au Maroc.


Ali ABJIOU
L'Economiste
 
Comment se fait-il que pendant toutes ces années les associations amazighes n'ont pas rédigé ou augmenté la production en tamazight à des fins utiles vers le peuple ?

Traduire Roméo et Juliette, c'est bien, mais voici exactement ce qui devrait être fait si l'on veut consolider et l'assise populaire de la demande amazighe et l'efficacité de l'alphabétisation en Tamazight.

Alors, aurons-nous des gens pour traduire le texte en darija vers Tamazight ?!

Il est à cette adresse : http://www.khbarbladna.org/
 
On peut dire Dda Agerzam que le Maroc a recule depuis 1960 jusqu aujourdhui....
Le gouvernement Abdallah Brahim a ete le seul gouvernement qui a fait la promotion de la Tamazighte ,Darija et arabe simultanement.
Les informations etaient diffusees en ces trois langues..........Les affiches informative de tous les ministeres se faisaient en Tamazighte ,Darija et arabe...............
Et voila qu on nou sorte la darija et pas n importe quelle darija celle de Tanja.
cecla veut dire une chose :
la politique linguistique suivie jusqu a present par les differents gouvernements du Maroc ont conduit a l impasse................Les Amazighes continuent a reclamer la reconnaissance constitionnelle de la langue du peuple marocain depuis l antiquite,les autres ceux qui sont ACCULTURES dans leur propre pays cherchent a promouvoir la DARIJA..........
L arabe et le francais qui sont deux langues de deux occupants historiques ne repondent plus aux besoins de communication des marocains.........
Le message est clair.........le Gouvernement actuel va s enteter..........

agerzam said:
Comment se fait-il que pendant toutes ces années les associations amazighes n'ont pas rédigé ou augmenté la production en tamazight à des fins utiles vers le peuple ?

Traduire Roméo et Juliette, c'est bien, mais voici exactement ce qui devrait être fait si l'on veut consolider et l'assise populaire de la demande amazighe et l'efficacité de l'alphabétisation en Tamazight.

Alors, aurons-nous des gens pour traduire le texte en darija vers Tamazight ?!

Il est à cette adresse : http://www.khbarbladna.org/
 
Il faut reconnaitre que la darija marocaine n'est pas tres agreable aux oreilles...

Cela dit, ca va etre a nouveau le meme casse-tete: comment ecrire l'arabe darija dialectal? en lettre de l'alphabet arabe ou en lettre de l'alphabet latin?
 
Amsernat said:
Il faut reconnaitre que la darija marocaine n'est pas tres agreable aux oreilles...

Cela dit, ca va etre a nouveau le meme casse-tete: comment ecrire l'arabe darija dialectal? en lettre de l'alphabet arabe ou en lettre de l'alphabet latin?

Ceci est un autre probleme qui à premiere vue ne nous concerne pas, c'est l'affaire des darijaphones et de tous ceux qui se considerent comme arabes....c'est leur affaire et je me garderai bien d' y fourrer mon nez...mais si ils militent pour que leur langue soit officielle alors je dirai qu'ils sont dans leur droit...

Le probleme c'est qu'ils sont convaincus qu'ils parlent arabe et qu'ils sont arabes et donc qu'ils n'ont rien à revendiquer de ce coté là..... et ça c'est peut-etre notre avantage pour l'avenir si on sait develloper notre langue et lui donner accés aux moyens de communication de masse, eux resteront cramponés à une langue que personne ne parle, sacralisée et figée et ils seront convaincus que c'est la leur
 
agoram said:
Ceci est un autre probleme qui à premiere vue ne nous concerne pas, c'est l'affaire des darijaphones et de tous ceux qui se considerent comme arabes....c'est leur affaire et je me garderai bien d' y fourrer mon nez...mais si ils militent pour que leur langue soit officielle alors je dirai qu'ils sont dans leur droit...

Le probleme c'est qu'ils sont convaincus qu'ils parlent arabe et qu'ils sont arabes et donc qu'ils n'ont rien à revendiquer de ce coté là..... et ça c'est peut-etre notre avantage pour l'avenir si on sait develloper notre langue et lui donner accés aux moyens de communication de masse, eux resteront cramponés à une langue que personne ne parle, sacralisée et figée et ils seront convaincus que c'est la leur


Je ne commprends pas: tu veux dire que tu souhaites que la darija soit ecrite en alphabet tifinnagh? ou alors carrement creer un nouvel alphabet pour la darija?

La darija au cas ou tu ne le sais pas, est un melange de plusieurs langues: l'arabe, le berbere, le francais, l'espagnol, et meme l'anglais...
 
Amsernat said:
Je ne commprends pas: tu veux dire que tu souhaites que la darija soit ecrite en alphabet tifinnagh? ou alors carrement creer un nouvel alphabet pour la darija?

La darija au cas ou tu ne le sais pas, est un melange de plusieurs langues: l'arabe, le berbere, le francais, l'espagnol, et meme l'anglais...


Non ce que je dis c'est que ce n'est pas mes affaires, c'est aux arabisés de faire ce choix, si toute fois ils veulent le faire...je ne me permettrai pas de leur faire la morale, c'est une affaire de famille et je n''en fais pas partie.... je n'irai jamais dire qu'ils sont manipulés par les ennemis du maroc, par les sionistes ou par les marsiens....et quelques soit leur choix (si choix il y'a ), je ne crierai pas à la menace de l'unité du maroc
 
Amsernat said:
Il faut reconnaitre que la darija marocaine n'est pas tres agreable aux oreilles...

Cela dit, ca va etre a nouveau le meme casse-tete: comment ecrire l'arabe darija dialectal? en lettre de l'alphabet arabe ou en lettre de l'alphabet latin?

ma7chemtich!! On pourrait pas en dire autant pour chelha :p
Sinon je suis contre l'introduction de l'apprentissage de la darija ou sa standardisation, pour moi c'est plus un moyen d'expression orale et artistique, il y a la radio, le theatre populaire pour celà!!
 
Cela dit, ca va etre a nouveau le meme casse-tete: comment ecrire l'arabe darija dialectal? en lettre de l'alphabet arabe ou en lettre de l'alphabet latin?


Tu sais très bien que ce n'est pas le cas ...
 
agoram said:
Ceci est un autre probleme qui à premiere vue ne nous concerne pas, c'est l'affaire des darijaphones et de tous ceux qui se considerent comme arabes....c'est leur affaire et je me garderai bien d' y fourrer mon nez...mais si ils militent pour que leur langue soit officielle alors je dirai qu'ils sont dans leur droit...

Tu te contredits. Toute l'heure tu fourrais ton nez et tes pieds dans l'affaire des lyceens d'Agadir, a qui tu niait le droit de manifester leur sentiments vis a vis des evenements du moment.
 
Lancement du 1er prix littéraire en «darija»

«Bladi bladna» est le premier prix littéraire consacrant une œuvre en prose en arabe dialectal marocain. L’idée a été annoncée en grande pompe par des écrivains la veille de la clôture. Parmi eux, Youssef Amine El Alamy et Dominique Caubet, sociolinguiste spécialisée dans les dialectes maghrébins et auteur du livre «Les mots du bled». Le prix cherche à récompenser la création littéraire en darija à travers les romans, nouvelles et récits.
Le nom du lauréat sera proclamé chaque année à l’occasion du Silt. Le prix sera attribué à un seul lauréat, il est doté d’un montant de 15.000 DH. Le manuscrit primé sera imprimé et publié durant la même année. Les manuscrits peuvent être envoyés à www.khbarbladna.org.

Amin RBOUB





Je me demande bien comment ils trouvent ce financement :rolleyes:
 
Excellente initiative ! Loin des dogmatismes qui paralysent l'action des Imazighn qui s'entêtent à utiliser un alphabet abscon (les Tifinagh), privilégiant l'émotivité des symboles au pragmatisme; et à vouloir érigé une langue commune à toutes les langues amazigh (Tachelhit, Tamazight et Tarifit) qui existente déjà ...
Prenons en de la graine ... les darijaphones sont largement en avance sur nous pour la défense des langues maternelles !
 
Ce n'est pas une raison pour faire comme ces journalistes haineux qui insultent la patrimoine culturel amazigh.

Tu peux trouver l'alphabet tifinagh innaproprié, ce n'est pas une raison pour l'insulter (et par là toute la charge symbolique qu'il représente dans divers aspects de la culture amazighe).

Il ne faut pas espérer que les autres te respectent si tu ne te respectes pas toi-même.

Ceci dit, il est vrai que ce sont des initiatives comme cela qui seront efficaces : pragmatisme.
 
" utiliser un alphabet ridicule"


Cela aurait été dit dans un journal marocain que beaucoup de gens se seraient sentis insultés et c'est normal.
 
Naissance de la presse en dialecte marocain ou «darija»

08.03.2006 | 13h59

«Chasser le naturel, il revient au galop» dit le proverbe. Les Marocains se sont acharnés depuis toujours à chasser leur langue maternelle, en l'occurrence la belle darija, celle de leur parler quotidien, du champ de la production écrite.
Le très philosophe et très panarabe Mohamed Abed al-Jabri écrivait que les arabes devraient se faire un devoir d' «éradiquer leurs parlers locaux pour conserver la pureté de la langue arabe classique».
Cet intégrisme linguistique n'est pas une spécialité marocaine ou arabe, loin s'en faut.

L'Europe en a bien connu au Moyen-âge sous la férule de l'Eglise catholique qui considérait les langues parlées de l'époque, français, italien, allemand et autres, comme des dialectes vulgaires qui n'avaient pas la beauté, la force d'éloquence de la langue de la Bible, le latin. On sait ce qu'en est advenu de la belle langue latine.

La darija est-elle en train de rentrer dans ses droits, comme autrefois, sous la plume de Rabelais et Ronsard, la langue «vulgaire» ?
On en est pas là pour l'instant, faute sans doute d'un Rabelais, mais elle est en train, cahin caha, de grignoter du terrain, pas encore au pas de galop, loin s'en faut, mais avec assurance et détermination.

Il faut rappeler qu'elle a pris sa place déjà dans le cinéma et le théâtre, mais pas encore dans le roman, l'essai et le reste.
Elle a à peine mis le pas dans la presse écrite.
C'est une femme anglaise qui est à l'origine de cette initiative, il y a quatre ans déjà. Madame Elena Prentice.
Fille de diplomate, la présence de sa famille au Maroc remonte au début du siècle dernier, «mon grand-père est enterré à Tanger, et ma famille est dans cette ville depuis six générations».

Son père, consul général de la couronne britannique dans les années 30, était revenu vivre à Tanger après sa retraite et jusqu'à sa mort. Elena Prentice n'a pas dérogé à la tradition, elle vit toujours à Tanger : « Je me considère comme marocaine et je souhaite obtenir la nationalité marocaine».

C'est cette Marocaine de cœur qui, un jour, il y a quatre ans, s'était dit : «pourquoi ne pas faire profiter de la lecture des gens peu alphabétisés et qui ont de la peine à lire en arabe classique en leur offrant un journal en darija ?».
Ce n'est pas pour rien que le pragmatisme est né en Angleterre. Aussitôt dit, aussitôt fait: «Khbar bladna» est né, un journal hebdomadaire de 20 pages fait avec les moyens de bord sans photos ni fioritures, à la mise en page très sommaire mais avec des rubriques riches en informations dont un éditorial, des conseils pratiques dans différents domaines tels la santé, la cuisine, la circulation routière, etc.

On trouve également une page de divertissement, un répertoire de numéros de téléphone pratique, et même des pages créations et culture. Une aubaine pour une population à qui on a interdit le plaisir de la lecture d'autant plus que le journal est offert gratuitement.

«J'ai eu la joie de voir des jeunes gens qui n'ont jamais pris un livre entre leurs mains, lire «Akhbr Bladna» en 20 minutes !», s'exclame Elena Prentice.
«Il est possible de réduire rapidement l'analphabétisme au Maroc en mettant à la disposition des populations cibles des écrits dans la langue d'usage quotidien qu'elles comprennent facilement». « Akhbar Bladna» aujourd'hui circule à travers le Maroc y compris dans les régions reculées, par le biais des associations, des points de vente, tels les pharmacies, les stations d'essence et les cafés.

L'expérience est tellement concluante qu'Elena Prentice et quelques uns de ses amis, dont l'écrivain Youssef Amie El Alami, eurent l'idée d'organiser un Prix littéraire consacrant les œuvres de création en darija.
Baptisé «Bladi Bladna», ce prix, doté de la bagatelle de 15.000 DH, sera attribué à la meilleure œuvre chaque mois de février à l'occasion du Salon international de Tanger.

Fils unique depuis sa naissance, «Khbar Bladna» vient d'avoir un petit frère il y a à peine trois mois. Né à Salé cette fois, il porte le joli nom de «Al Amal».
Cette fois c'est un vrai magazine mensuel en couleur et avec des illustrations en abondance qui, apparemment, a l'intention de jouer dans la cour des grands.

Initié par l'institut supérieur de l'information et de la communication (Isic) et l'association française International Média Formateurs Associés (Imfa) en partenariat avec la fondation Alexandre et Marguerite Varenne, «Al Amal» fait partie d'un programme «qui vise la formation de 16 jeunes Slaouis, dont 8 filles, au métier du journalisme de proximité», nous confie Mohamed Znaïbi, le directeur de publication du magazine, lui-même formateur à l'Imfa.

« Le but est de donner à ces futurs journalistes la possibilité de diriger eux-mêmes leur journal et éventuellement de créer des emplois pour d'autres».
Le magazine est bien fait, agréable à lire. On y trouve des articles très divers, économie, société, sport, art et culture. Distribué gratuitement, il se veut un exemple de journalisme de proximité que d'autres jeunes pourraient suivre.


Abdelaziz Mouride | LE MATIN

http://www.lematin.ma/journal/article.asp?id=soc&ida=58407
 
D'illeurs j'ai toujours aimé les romans d'Abdallah Laroui en langue Arabe, surtout que les dialogues qui etaient dans la plupart en Dialecte Marocain et j'etais enchantée par le fait qu'il puise à fond dans notre patrimoine culturelle:Sidi Bouchaib, Aicha al Bahrya..Une vraie merveille.
 
Ca m'énerve ! Toujours cette hypocrisie de la presse marocaine. :mad:

Ca fait des années que l'on dit qu'il faut faire lire les Amazighs dans leur langue et ce message n'a jamais été relayé. Toujours la chanson des extrémistes berbéristes qui en veulent à la langue arabe.

Maintenant que cela se passe en darija, c'est super, on en parle dans tous les journaux, l'idée du siècle !

Quel journal marocain va oser dire la même chose pour l'amazighe ?!!

Et pourquoi un darijophone avec un journal en darija le lit en 20 minutes et le berberophone, on entend toujours dire "c'est difficile, on a pas l'habitude de lire notre langue".

Y en a un qui est plus bête que l'autre ou quoi ?! :eek:
 
Communication. Do you speak darija ?


Al amal, revue en darija
de Mohamed Zaïnabi.(DR)

Elle est bien sympathique, notre darija, dans sa formule écrite. Accessible à tout le monde, elle investit petit à petit le champ des médias, de la culture et de la publicité. La “langue du peuple” se libère. Non sans difficultés…


Elle peut être perçue comme vulgaire, rebelle, infidèle. En tout cas, elle ne laisse pas insensible. La darija (arabe marocain) cristallise les passions du fait de sa relation intime, voire fusionnelle, avec le peuple. Ouverte aussi bien aux termes crus de la rue qu'aux plus raffinées des courtoisies, la langue maternelle des Marocains a été longtemps confinée dans les traditions orales. Maintenant, elle s'impose dans le domaine de l'écrit. Presse, culture, publicité…la darija se réapproprie les voies qui lui ont été interdites dans le passé au nom de l'identité arabe.

Partout où elle est écrite, la darija suscite l'attention, la curiosité, voire même l'étonnement. “Au souk Lakhmiss à Salé, j'ai été ravi d'apercevoir des marchands qui ne se sont jamais intéressés à la presse, oublier momentanément leurs commerces pour lire mon journal”, témoigne fièrement Mohamed Zainabi, directeur de publication du magazine Al Amal, entièrement écrit en darija. Les gens
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sont fascinés autant par la facilité de compréhension que par la forme de l'écriture, calquée sur l'arabe classique. Alors, ils prennent le temps de lire ou d'écouter celui qui lit. Un nouveau lectorat est en train de se constituer. Il est constitué d'analphabètes ou de gens ayant quitté l'école très tôt. En gros, cette catégorie de personnes représente plus de la moitié des 30 millions de Marocains. Avec ses pauvres 300 000 lecteurs, la presse marocaine a de quoi se poser des questions.

Khbar Bladna, un hebdomadaire édité à Tanger par la dynamique Elena Prentice, est passé de 3 000 à 6 000 exemplaires, distribués un peu partout au Maroc. La presse en darija a de beaux jours devant elle. En témoigne, l'expérience de l'ancien magazine satirique Khbar Souk qui réalisait des ventes impressionnantes. D'ailleurs, depuis trois semaines, l'équipe de Khbar Bladna a dû rajouter des articles en tachelhit, tamazight et tarifit pour répondre à la forte demande de la population. Elle assure aussi avoir reçu deux candidatures juste après l'annonce du Prix de la création littéraire en darija qu'elle a lancé, il y a deux semaines.

La darija, fille de la rue
Un tel succès n'a pas manqué de heurter certaines sensibilités. “Une fois, dans une conférence de presse, nous avons été violemment critiqués par un journaliste arabophone qui n'admettait pas qu'on puisse écrire avec une langue autre que l'arabe”, raconte une membre de l'équipe de Khbar Bladna. Très tôt à l'école, on apprend que l'arabe est la langue du Coran, de la littérature, de la politique… Bref, la langue de toutes les belles choses. La darija, comme un vulgaire patois, est confinée à l'intimité, à la rue et aux transactions commerciales. Pas étonnant qu'une renaissance par l'écrit puisse choquer certains puristes. “Le grand problème des pays arabes, c'est qu'ils ont établi des critères nationaux pour la langue et les ont rattachés au mythe de l'unité arabe”, explique le socio-linguiste Mohamed Dahbi. Il a bien raison. L'unité arabe, c'est un mythe. Donc, personne n'y croit. Alors autant parler et écrire le langage que tout le monde comprend. Mais quelle darija au juste ? Celle des rappeurs, crue et métissée, celle des publicitaires, aseptisée et concise, celle des journaux, informative et directe ? C'est un véritable casse-tête que de vouloir uniformiser tout cela.

“Va expliquer à un vieux ce que veut dire le terme mouvi aliya (de l'anglais moove for me, qui veut dire littéralement, soutiens-moi)”, s'esclaffe de rire Hicham Abkari, responsable culturel à la Wilaya de Casablanca. Ces termes nouveaux, on les entend presque tous les jours. Ils ont acquis une notoriété musicale grâce au rap. Depuis la sortie du titre Raw daw, le parler-vrai des jeunes musiciens a instauré une coupure par rapport à la “pseudo darija”, utilisée dans les séries télévisées et les chansons. “On nous a formatés à une darija standardisée que nous ne parlions même pas”, fait remarquer Mohamed Merhari, alias Momo du Boulevard des jeunes musiciens. La fracture linguistique a été beaucoup plus prononcée dans le rap puisque ce genre musical est, à la base, une musique de rue, de rébellion, de transgression des tabous. Dans le rap, la langue s'est déchaînée. Et le discours, s'est-il libéré pour autant ? Ce n'est pas évident. En chantant en darija, les jeunes reprennent quelques stéréotypes de l'unité arabe, genre “Ana ârabi” ou évoquent la lutte de la Palestine. Pourquoi ? “Les rappeurs ont encore un problème de légitimité et d'affirmation de soi”, explique Abkari. Depuis le procès des satanistes, la création artistique des jeunes baigne dans un flou législatif très dangereux. Du coup, “ils ne savent pas sur quoi écrire”, soutient notre source. Naturellement, la darija n'était pas concernée dans cette affaire. Mais une idée pernicieuse est restée dans les esprits: c'est que l'Etat peut toujours sévir.

Cacophonie ambiante !
Mais sévir contre quoi ? Du fait de la ghettoïsation dont elle a souffert, la darija est devenue insaisissable, réfractaire aux académismes, rebelle. Parfois, nous avons du mal à comprendre certaines expressions importées qui s'intègrent presque à notre insu dans le parler et l'écrit. A se demander comment les Marocains arrivent à communiquer dans cette cacophonie ambiante! Bipini (bipe moi), mchargi (recharger la carte), sms-moi… les communications téléphoniques ont introduit un nouvelle écriture qui a ouvert les yeux des publicitaires sur l'énorme potentiel commercial que recèle l'utilisation de la darija. Du coup, ils multiplient les simulations, réfléchissent longuement avant d'écrire quoique ce soit en darija. Ils tiennent quand même à faire du tri pour ne pas se perdre dans cette langue en constante évolution. La publicité utilise, ce que Hamid Faridi, directeur associé de l'agence Diapason, appelle la darija “aspirationnelle”. C'est “le dialecte de la ville” soft, concis que tout le monde peut comprendre. Le terme “toumoubil” (voiture) sera privilégié à “hdida” par exemple.

“On peut s'attendre au pire avec cette bent zanqa (fille de la rue) qui ne demande qu'un peu d'attention pour révéler son côté gracieux”, soupire allégrement Fadili. C'est impressionnant ce que notre chère darija peut catalyser comme fantasmes… Arrivera-t-on à la dompter ? Non, visiblement. En revanche, il arrivera un jour où des ponts seront jetés entre elle et l'arabe classique. Des linguistes comme Mohamed Dahbi y croient parce que cela a marché de cette façon dans d'autres pays. “Nous arriverons à établir une langue standard qui sera à moitié arabe, à moitié darija”, explique-t-il. D'ailleurs, l'amazigh tend aussi vers cette solution médiane pour régler les différences linguistiques entre ses trois dialectes. Mais alors, si cette langue médiane est incontournable, à quoi sert de développer la vocalisation de la darija ou de soigner le langage écrit ? Ceux qui s'engagent dans cette voie ne se posent pas de telles questions. Ils n'attendent pas que la darija ait droit de cité. Ils le lui donnent.
 
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